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Hier, c’était le 5 à 7 des Semeurs de contes en collaboration avec Cantine Motivée. Ici, je souligne la contribution inestimable de Céline Jantet!

Lors de cette soirée, nous avons eu le plaisir de retrouver d’autres conteurs, des amis, de présenter notre projet La grande virée des Semeurs de contes, qui commencera demain, à 9 h, au métro Papineau. Le mot de notre parrain, Gilles Vigneault, a été lu avec beaucoup d’émotion par Françoise Crête.
Un second parrain, arrivé comme un cadeau du Ciel, est venu nous encourager dans notre quête pour semer et récolter des histoires, de Montréal à Québec. Il s’agit de Pierrot Rochette. Pierrot est le plus sympathique vagabond du Québec. Un très beau portrait documentaire, Mon ami Pierrot, Le dernier homme libre, a d’ailleurs été réalisé à son sujet. Même le conteur québécois, Simon Gauthier, lui rend hommage dans son spectacle très touchant : Le vagabond céleste.
C’est le cœur rempli de fierté que j’ai reçu, pour la route et en prêt, le bâton de Pierrot. Son bâton de parole, de marche et de sagesse. Celui qu’on lui a échangé il y a sept ans. Celui sur lequel je pourrai m’appuyer pour me donner de la force et du courage le long de mon parcours de marcheuse et de semeuse de contes. Vous le verrez durant nos spectacles. Il sera le témoin de nos aventures ainsi que le symbole fort de la passion qui nous habite et qui nous unit : celle du conte.
Merci Pierrot! Je te remettrai ton bâton au retour, compte-sur-moi. Il sera imprégné de notre fatigue, de la pluie et du beau temps, mais aussi de la réussite de ce projet audacieux
Note :
Pour en savoir plus sur Pierrot, visitez son site internet.

10-LE BÂTON DE LA STE-VIERGE

Quand j’arrive chez Raynald Boutin à La Tuque, et qu’il me remet un vieux bâton scout, depuis 30 ans dans sa cave, sculpté par son gars alors qu’il avait 13 ans, il y avait à l’intérieur du haut du bâton, une petite grotte avec une statue de la Ste-Vierge, la même qu’il y a 30 ans…

Et je marchai trois jours avec la Ste-Vierge. Je me rendais compte que son personnage était passé de réalité à raconte et de raconte à conte. Elle n’était plus qu’un conte qui vacillait sur son trône de coup de bâton en coup de bâton. Elle tomba du bâton plusieurs fois, je la reposai.

Plus j’avançais avec, plus j’étais mal à l’aise… Je me rappelai de ce raconte du Frère André vécu personnellement à l’oratoire St-Joseph.

J’avais passé plus d’un an à lire des livres de théologie, à assister de 3 à 7 messes par jour juste pour mesurer la distance phénoménologique et culturelle entre mon enfance et ma vieillesse.

La caféteria de l’oratoire St-Joseph était mon bureau. J’y écrivais des chansons avec ma guitare.. Durant plus de 2 mois, un homme d’une quarantaine d’années, chauve habita la même table devant son portable.

Un après-midi, il traverse diagonalement, se rend à ma place et me dit: j’en peux plus de souffrir… Je lui dis, viens je t’emmène au tombeau du frère André, tu vas déposer tes mains et tu vas lui dire à haute voix ce que tu voudrais qu’il fasse pour toi:)))

Et l’homme de dire… frère André, j’ai perdu ma femme, mes enfants, mon emploi, je vis dans une petite chambre minable à Verdun, je me suis fait une blonde mais je suis aussi à la veille de la perdre… Frère André, je suis incapable de vivre seul, donnes-moi une femme et fais que je sois certain que c’est toi qui me l’envoie:)))

Et moi de lui dire… fais attention à ce que tu demandes… le frère André est réputé pour être très vite et tu risques d’être pogné avec la femme:)))

Le soir, une voix à l’intérieur de moi-même me dit qu’il y a urgence à l’oratoire de de m’y rendre immédiatement… je prend le petit autobus… arrivé en haut.. je croise l’homme qui me dit… Ca adonne bien que je te vois, je m’en vais me tuer…..

Tu vas faire ça comment que je lui dis… Je m’en vais me jeter en bas du métro. Ca parait que tu viens pas de Montréal que je lui dis… ici tout le monde sait que c’est le meilleur moyen pour rester infirme toute ta vie…

Je l’emmenai avec moi au petit bar sur la rue St-Denis, empruntai une guitare et la petite scène, je lui chantai trois ou quatre de mes chansons pour le détendre…

Au retour je lui dis… rentre chez toi et le frère André va prendre soin de toi cette nuit…

Le lendemain matin 7 heures, j’arrive à la cafeteria… voila que mon homme me sourit à pleines dents devant son portable. Et il me raconte… Cette nuit, j’ai chatté et une fille a qui j’avais parlé il y a plus d’un an m’a écouté et m’a répondu ceci… C’est normal que tout s’écroule dans ta vie, ça fait un an que je t’attend… Et il me montre la photo de la fille… Une vraie belle fille, à couper le souffle.

Je dis au gars viens avec moi dans la salle de bain… Regarde-toi dans le miroir… C’est impossible qu’un gars laid comme toi ait séduit une si belle fille… Viens on va aller sur le tombeau du Frère André et tu vas déposer tes mains sur le tombeau en lui demandant la grâce qu’elle reste aveuglée par son amour pour toi et qu’elle en se réveille pas…

Ce qui fut fait ainsi et le gars est parti la rejoindre à Québec, je ne l’ai jamais revu…

Et moi de dire à la Ste-Vierge sur mon bâton… c’est-tu vraiment le frère André qui a fait ça? tu trouves pas que mon histoire du frere André qui m’est réellement arrivée ressemble à un conte urbain… Et même toi sur mon bâton, je suis incapable de te voir autrement qu’un conte urbain.

C’est ainsi que je déposai la Ste-Vierge dans la forêt, et que je suis maintenant hanté par une grotte ou son souvenir est infiniment plus intense que sa présence.

Qu’est-ce qu’un conte? c’est un trou dans le bâton de la réalité…

Voilà la raison pour laquelle j’ai pensé que mon bâton de vagabond-raconteur pouvait humblement symboliser la marche des semeurs de contes par le côt&eacut

(SUITE)

Qu’est-ce qu’un conte? c’est un trou dans le bâton de la réalité…

Voilà la raison pour laquelle j’ai pensé que mon bâton de vagabond-raconteur pouvait humblement symboliser la marche des semeurs de contes par le côté sacré d’un espace à conter imprévu.

Je pensai, par ce geste, parrainer une jeune conteuse, Geneviève Falaise, comme le ferait tout grand-père de la beauté du monde car le conte, c’est de se faire le frère André ou la Ste-Vierge de tous ceux et celles qui ont soif d’espérance de magie dans leur vie.

Pierrot

ps. c’est ce conte urbain qu’après ma mort on racontera en montrant le bâton d’un personnage assez flyé pour s’être pris pour un archétype:)))))))))))

Pierrot
vagabond