LA GROUNDED THEORY….. OU LA THÉORISATION ENRACINÉE DE STRAUSS ET CORBIN…. BASE MÉTHODOLOGIQUE À APPROFONDIR POUR BIEN DESIGNER LA DRAMATURGISATION DU DOCTORAT DE NOTRE ÉQUIPE DE RECHERCHE (AULD, WOODARD,ROCHETTE) DANS UNE PROBLÉMATIQUE DE L’ONU VERSUS UNE CHARTE DE LA NANO-CITOYENNETÉ-PLANÉTAIRE EN VUE DE BIEN FAIRE ÉMERGER LA MARCHE À L’ONU DE JUIN 2020….

Résumé
Les concepteurs de la Grounded Theory proposent une approche qui est supposée
favoriser l’innovation scientifique par une méthode d’enracinement de l’analyse dans
les données de terrain. L’objectif de cet article est de mettre à l’épreuve cette prétention
en essayant d’abord de comprendre en quoi et comment l’approche méthodologique
proposée par la Grounded Theory peut favoriser l’innovation en recherche scientifique
et, ensuite, en essayant de mettre en cause cette prétention afin d’en identifier quelques
limites.

Mots clés
GROUNDED THEORY, INNOVATION SCIENTIFIQUE, INDUCTION, ÉMERGENCE

L’approche de la Grounded Theory; pour innover?
La problématique sous-jacente à cette réflexion méthodologique se situe dans
la prétention qu’ont les concepteurs de la Grounded Theory1 de proposer une
approche qui favorise l’innovation scientifique. Dès leur tout premier ouvrage
sur la GT, Barney Glaser et Anselm Strauss (1967) ont présenté celle-ci comme
une méthodologie générale qui permet de générer de nouvelles théories en
sciences humaines et sociales. Dans cet ouvrage, le ton est résolument
polémique et le style est celui d’un manifeste pour une façon différente de faire
la recherche scientifique (Dey, 1999). Ainsi, la GT est définie en opposition
contre les approches hypothético-déductives dans lesquelles les chercheurs
partent de postulats a priori pour déduire des explications des phénomènes, les
données empiriques ne servant que d’« exemples » dans un processus
d’application des théories existantes. À l’inverse, la GT est présentée
essentiellement comme une approche inductive par laquelle l’immersion dans…

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Conclusion
La GT a été proposée par Glaser et Strauss comme une approche
méthodologique générale ayant comme but principal de générer de nouvelles
théories en sciences humaines et sociales. C’est une approche de
« découverte » et c’est en ce sens qu’elle prétend favoriser l’innovation. On
parle ici d’une dynamique de « découverte », non pas dans le sens positiviste
d’une observation objective de ce qui se donne à voir dans la réalité, mais
plutôt dans le sens de développer de nouvelles façons de comprendre les
GUILLEMETTE / L’approche de la Grounded Theory 46
phénomènes humains. C’est de la découverte au sens de l’innovation dans les
interprétations proposées. Les chercheurs qui empruntent cette approche ne
veulent pas en rester aux explications déjà fournies. Glaser (2001, p.100)
souligne le fait qu’une telle approche favorise l’originalité dans les apports
scientifiques (cf. Schreiber, 2001, p.57).
Les procédures méthodologiques sont présentées comme des moyens de
« développer le champ » dans les différentes disciplines plutôt que de s’en tenir
à documenter, par des données additionnelles, des théories existantes. Ainsi, la
contribution scientifique des recherches en GT ne se situe pas dans une logique
d’accumulation, mais plutôt dans une logique de reconstruction constante par
une intégration des théories émergentes à l’architecture des connaissances dans
un champ disciplinaire ou transdisciplinaire.
Ce potentiel d’innovation qui se trouve dans la spécificité de l’approche
fait que celle-ci peut être utilisée non seulement pour des questions de
recherche qui n’ont jamais fait l’objet d’une étude scientifique (Laperrière,
1997; Schreiber, 2001), mais aussi pour la possibilité qu’elle offre de jeter un
regard neuf sur des phénomènes qui ont déjà été étudiés.
Les chercheurs qui choisissent l’approche de la Grounded Theory comme
méthodologie générale le font parce qu’elle leur permet de créer de nouvelles
idées et des conceptions innovantes; ils y voient une approche qui leur permet
de contribuer vraiment au développement des connaissances.
Par contre, comme nous l’avons vu, la prudence et la réflexivité
s’imposent dans la démarche tout au long des opérations d’analyse,
d’échantillonnage et de développement des éléments théoriques. Sans cette
vigilance, le chercheur peut glisser, en s’en rendant compte plus ou moins, vers
ce qu’il est supposer éviter, c’est-à-dire la vérification de théories existantes.
1. L’appellation anglaise Grounded Theory a été conservée à cause de sa claire
identification à la méthodologie élaborée et présentée par Barney Glaser et Anselm
Strauss. Les traductions françaises de l’appellation de cette méthodologie sont non
seulement diverses, mais elles sont également attachées, dans la plupart des cas, à des
adaptations de la méthodologie, par exemple, chez Paillé (1994, 1996). De plus, les
différentes traductions du nom Grounded Theory sont assez discutables et discutées.
Afin d’éviter d’entrer dans cette discussion, nous suivons l’exemple des chercheurs
francophones qui ont conservé l’appellation originale (par exemple, D’Amboise &
Nkongolo-Bakenda, 1992; Demazière & Dubar 1997, Laperrière, 1997) Par contre,
c’est l’abréviation GT qui est utilisée pour désigner la Grounded Theory.
RECHERCHES QUALITATIVES / vol 26(1) 47
2. Nous employons ce terme anglais non pas pour faire un mauvais anglicisme, mais
plutôt parce que nous n’arrivons pas à traduire adéquatement ce terme central en
Grounded Theory.
3 C’est la traduction que propose Baszanger (1992) pour l’expression « Constant
Comparative Method ». Paillé (1996) traduit par « comparaison constante ».
Références
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