Un multivers ne serait peut-être pas si inhospitalier à la vie
Les univers parallèles, s’ils existent, pourraient ne pas être aussi inhospitaliers à la vie qu’on le pensait à ce jour, montrent des simulations informatiques de l’énergie noire qui imprègne l’espace.
Un texte d’Alain Labelle
Deux études publiées cette semaine, l’une britannique et l’autre australienne, sont consacrées au multivers – cette théorie avancée en cosmologie moderne selon laquelle notre Univers ne serait qu’un parmi tant d’autres.
La question de savoir si d’autres univers pourraient abriter la vie est au centre des débats depuis l’introduction de la théorie des multivers dans les années 1980.
Un multivers de vie
Les nouvelles recherches menées par des astrophysiciens de l’Université de Durham, au Royaume-Uni, et de l’Université de Sydney, en Australie, tendent à montrer que la vie pourrait potentiellement être plus commune qu’on le pensait dans ces autres univers qui n’existent pour le moment qu’en théorie.
La clé de cette possibilité, affirment ces astrophysiciens, réside dans l’énergie noire (sombre), cette force toujours mystérieuse qui imprègne naturellement l’espace et accélère l’expansion de l’Univers.
Des théories, des univers
La théorie actuelle de l’origine de l’Univers prédit beaucoup plus d’énergie noire que ce qu’on y observe. Or, l’ajout de grandes quantités de cette énergie causerait cependant une expansion si rapide qu’elle diluerait la matière avant que les étoiles, les planètes ou même la vie ne puissent se développer.
« Pour plusieurs physiciens, la quantité inexpliquée d’énergie noire dans notre Univers est un casse-tête frustrant. »
— Jaime Salcido, Université de Durham
La théorie des multivers permet d’expliquer l’« idéale » petite quantité d’énergie noire retrouvée dans notre Univers qui aurait permis d’y accueillir la vie, alors que d’autres univers n’auraient pas pu l’abriter.
Mais c’était avant les présents travaux. En utilisant les simulations informatiques les plus réalistes du cosmos à ce jour, les chercheurs ont découvert qu’ajouter de l’énergie sombre, jusqu’à quelques centaines de fois la quantité observée dans notre Univers, n’aurait qu’un impact modeste sur la formation des étoiles et des planètes.
« Nos simulations montrent que même s’il y avait beaucoup plus d’énergie noire ou même très peu d’énergie dans l’Univers, cela n’aurait qu’un effet minimal sur la formation des étoiles et des planètes. »
— Jaime Salcido, Université de Durham
« Ces simulations laissent à penser que la vie pourrait être possible dans tout le multivers », explique M. Salcido.
Son collègue australien, Luke Barnes, explique : « Avant, le concept de multivers permettait d’expliquer la valeur observée de l’énergie noire un peu comme une loterie. Dans notre Univers, nous avions en quelque sorte un billet gagnant puisqu’il s’y forme de belles galaxies qui permettent la vie ».
« Notre travail montre que notre billet est un peu trop chanceux, pour ainsi dire. C’est en tout cas plus spécial que ce qu’il ne faut pour abriter la vie. »
— Luke Barnes
Trop d’énergie pour un univers
Leur collègue Pascal Elahi ajoute que les simulations ont montré que l’expansion accélérée par l’énergie noire n’a guère d’impact sur la naissance des étoiles, et donc sur la présence éventuelle de la vie.
« Même si on augmente l’énergie noire des centaines de fois, cela pourrait ne pas suffire à créer un univers mort. »
— Pascal Elahi
Des trous dans la théorie
Ces résultats inattendus sont problématiques, car ils mettent quand même en doute la capacité de la théorie du multivers à expliquer la valeur relativement faible observée de l’énergie noire dans notre Univers.
Bien que les résultats n’excluent pas l’existence d’un multivers, il semble que la petite quantité d’énergie sombre dans notre Univers serait mieux expliquée par une loi de la nature qui reste à ce jour inconnue.
Vers une nouvelle physique
« La formation des étoiles dans un univers est une bataille entre l’attraction de la gravité et la répulsion de l’énergie sombre », affirme le Pr Richard Bower, de l’Institut de cosmologie computationnelle de l’Université de Durham.
« Nous avons découvert dans nos simulations que des univers avec beaucoup plus d’énergie sombre que les nôtres peuvent heureusement former des étoiles. Alors pourquoi n’y a-t-il qu’une telle quantité dérisoire d’énergie noire dans notre Univers? »
— Richard Bower
« Je pense que nous devrions chercher une nouvelle loi de la physique pour expliquer cette étrange propriété de notre Univers, et la théorie des multivers ne permet pas d’effacer le malaise des physiciens », conclut le Pr Bower.
Le détail de ces travaux est publié dans les Monthly
SUR GOOGLE: MICHEL LE CONCIERGE