COURRIEL DE MON AMI, LE CONTEUR INTERNATIONAL SIMON GAUTHIER

À
pierrot rêveur
Aujourd’hui à 11 h 04
Allo Pierrot!
Rdv Tim Horton à côté de l’hôpital juif de MTL.
12 janvier samedi

Bien hâte de renouer avec toi et nos activages de rêveries appliquées.

Au travers de vagabondages d’histoires
j’aimerais que tu me parles de Paulo. De Paulo et de Yolande
Sa papauté et autres grands moments

J’ai déjà dans l’actif Paulo: son agence de voyage (perron), son remariage avec la riche veuve. Le vol de leurs avoirs dans le train.

Du Paulo

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Aussi, il y a ton histoire après avoir vu le clown… Tu me l’avais raconter hi hi hi merveilleuse mais je l’ai égarée, pourrais-tu me la re raconter stp. avec tout le cheminement de pallier Maître! (l’africaine etc!)

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Margaret Sanger: aurais tu un bon livre à son sujet et avec l’inventeur Pincus

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Aussi je fais de l’écoute documentaIre au sujet de Darwin.

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Également j’aimerais passer du temps avec Michel le concierge.

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Bref, j’avance dans le brassage de ton sillage et je fais de liens avec ton épopée!

Pierrôt! tu vas l’avoir ! Je t’encourage. Tout se tient.

à bientôt

ton ami Simon dans l’hiver tranquille ébullition!

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RÉPONSE-COURRIEL DE PIERROT À SIMON

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Cher Simon,

pour Margaret Sanger, tu peux faire venir le livre en anglais sur amazon…. «the autobiography of Margaret Sanger»…

“A moving story of action — direct, forceful, and plain-spoken.…It would be difficult to overestimate the importance of this autobiography.” — Saturday Review of Literature.
While working as a nurse amid the squalor of New York’s Lower East Side in the early twentieth century, Margaret Sanger witnessed the devastating effects of unwanted pregnancies. Women already overwhelmed by the burdens of poverty had no recourse; their doctors were either ignorant of effective methods of birth control or were unwilling to risk defying the law.
Sanger resolved to dedicate her life to establishing birth control as a basic human right. Her battles brought a world of troubles — arrest, indictment, and exile among them — but ultimately she triumphed, opening the first American birth control clinic in 1916 and serving as the first president of the International Planned Parenthood Federation in 1953.
A fascinating firsthand account of an early crusade for women’s healthcare, this autobiography is a classic of women’s studies and social reform.

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Pour ce qui est de Paulo, Yolande, la papauté et autres grands moments (son agence de voyage sur le perron, son remariage avec la riche veuve, le vol de leurs avoirs dans le train)….

Cher Simon, c’est toute la poésie de mon enfance que tu me demandes de te raconter… et je me demande si mes mots seront assez épiques pour bien peindre de grands artistes du quotidien que furent ces pionniers et pionnières grâce à la musique classique et la fanfare du moulin de La Tuque.

Imagine-toi un village issu de l’impossible…. Perdu entre deux montagnes, à 100 kilomètres par bois et rivière St-Maurice de la petite ville de Trois-Rivières, un moulin à papier surgit de nulle part parce que des américains, la famille protestante des Brown venant des États-Unis veut faire le commerce de la pulpe sous différentes formes.

Mon grand-père Lucien Rochette arrive donc de St-Raymond de Portneuf pour s’y établir, comme des centaines d’autres.

Rapidement s’établissent donc deux communautés: Les dominants, protestants anglophones (quelques dizaines de personnes)  ne parlant qu’anglais qui vivent dans de jolies maisons l’autre bord de la track menant au moulin… et de l’autre côté de la track, les dominés catholiques francophones peu ou pas instruits tournant autour du curé Corbeil qui lui se charge de faire régner la paix entre protestants et catholiques, parce que les protestants donnent de l’emploi.

Ces anglophones dominants protestants sont ce qu’il y a de plus paternalistes… La main d’œuvre est captive, soumise, dévouée… L’ouvrage est difficile… personne n’a le moyen de perdre… ni les anglais, ni les français.

Dans ce temps-là, il n’y avait ni radio, ni t.v…. et un des propriétaires de l’usine de papier Brown est un amoureux fou de la musique classique…. amoureux fou au point d’acheter des instruments pour que les travailleurs de l’usine puissent en jouer et former une harmonie… Les répétitions auront lieu dans un local annexe à l’usine…

Ces hommes peu instruits et soumis à la hiérarchie des pouvoirs apprennent sans même qu’ils le sachent la poésie, la liberté, le rêve par la musique qu’ils apprennent à jouer alors que la plupart sinon tous n’avaient même jamais joué d’un instrument dans leur vie.

La musique rend la ville folle de joie de rêver collectivement l’impossible… Comment être heureux, solidement heureux alors que tout le contexte pionnier rend sédentaire des misères du quotidien.

Nous sommes quelque part vers 1920…. Selon ce que je me souviens des racontes de mon grand-père Lucien, il est un jeune homme heureux…. Son père est mort quand il avait 5 ans après être tombé du toît qu’il déneigeait et il est tombé sur un piquet de clôture…, Etais-ce à St-Raymond de Port neuf ou à la Tuque? probablement St-Raymond de Portneuf… il se rappelle qu’à Noel, pendant que son père hurlait de douleur, il avait ordonné à sa femme d’aller jouer de l’accordéon à piton , pipe dans la bouche, et de faire danser les enfants en pied de bas pour qu’on ne l’entende pas crier…

Mon grand-père Lucien aurait rencontré ma grand-mère Lumina alors qu’elle s’en allait aux États avec ses parents travailler dans une manufacture…. ils se sont finalement mariés… je sais peu de choses là-dessus car ma grand-mère Lumina était en fait une spécialiste des larmes de joie ( elle pleurait à chaque iere neige, à chaque arc-en ciel, à chaque naissance) mais refusait de pleurer de peine…  Plusieurs fois, J’ai entendu mon grand-père Lucien qui ne comprenait rien à la différence entre les larmes de joie et les larmes de peine….  lui dire: Lumina, va faire le tour du carré le temps que ça sèche…

Souvent, quand j’étais petit, j’allais chez Memère Lumina et ensemble, chacun sur notre chaise, on pleurait en silence des larmes de joie… elle était la reine de la beauté du monde par la fraîcheur de ses larmes….

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Durant ces ieres années de la fondation de la ville de La Tuque,La musique ensorcèle tous ces hommes qui travaillent au moulin…. au point où rapidement, selon les racontes de mon grand-père Lucien, deux orchestre se partagent la ville…. deux orchestres des Rochette… celle de Pitt Rochette à un bout de la petite ville et celle de Lucien Rochette à l’autre bout… et cela en plus des répétitions de l’harmonie où tous et chacun viennent puiser le courage relié à la poésie du quotidien.

Celle de Pitt est composée d’adultes… Celle de mon grand-père elle surgit d’une poésie reliée et à l’épique de ses choix, et à la magie de l’enfance.

Un jour mon grand-père (selon ses racontes) arrive à l’usine et dit à son patron immédiat: Je suis un artiste… je quitte pour créer mon orchestre et je sais qu’un jour le moral des gars va être tellement bas que t’auras pas le choix de me réengager….

Un de mes frères, (François je crois) qui possède l’album de famille) détient une photo où l’on voit sur sa galerie Mon grand-père Lucien, ma grand mère Lumina et leur 4 enfants en train de répéter pour fonder son orchestre Rochette: Objectif… jouer dans les mariages, les fêtes de famille en échange de manger….

Mon père Roger est tellement petit que sa mandoline (si je me souviens bien) paraît grosse entre ses mains, mon oncle Paulo, ma tante Dine et ma tante Micheline..

Mon père n’a jamais trouvé très drôle cette période de sa vie où ils avaient de la misère à manger et à se chauffer parce que mon grand-père Lucien refusait de travailler parce qu’il était un artiste….

Mais la ville grandit… Arrive Aubert Mongrain…. chef de l’harmonie de La tuque et enseignant à l’école St-Zéphirin… Un homme passionné, autoritaire, charismatique qui fera en sorte que la ville de Latuque soit la ville de la musique au Québec.

Quand il se marie dans le bout de Trois-Rivières, il louera un autobus pour transporter tous ses musiciens pour qu’ils jouent à ses noces… Mon père doit avoir 15 ans… Il va le voir…. lui dit Monsieur Mongrain, j’aimerais apprendre la trompette… Monsieur Mongrain lui donne un livre et lui dit… passe à travers ça et après ion verra ce que je peux faire pour toi… Quelques mois plus tard, mon père revient… il a de loin dépassé le livre… il joue devant Aubert Mongrain stupéfié (mon père gagnera le premier prix de trompette de la province de Québec à C.K.A.C en 1948, l’année de ma naissance.)

A ce moment-là, comme tous les jeunes hommes de la ville de La Tuque, mon père a commencé à travaillé au moulin. Aubert va voir le propriétaire du moulin et demande que mon père travaille sur H R Hillier comme vendeur d’habit de jour pour qu’il puisse devenir iere trompette à l’harmonie de La Tuque.

C’est dans ce contexte que mon père rencontre ma mère… Histoire qui m’a été contée par la fille de la chambrière qui a accueilli mon père…. Parce que mon grand-père Lucien est reparti avec sa femme et  ses autres enfants à St-Raymond de Portneuf après s’être acheté un cheval, mon père prend la décision d’habiter en chambre… Il a comme tout effet personnel, sa trompette et une grande malle vide qu’il veut remplir morceau par morceau parce qu’il a idée de se marier…..

Il passe souvent avec son bel habit de joueur de l’harmonie de La Tuque et sa trompette sur la rue commerciale où habite le père de ma mère, Pepére Lefebvre et sa femme (caractère incroyablement difficile) qui elle surveille comme la prunelle de ses yeux sa dernière fille encore à la maison (Rolande)…

Mon grand-père Lefebvre , après avoir travaillé au moulin a trouvé un emploi sur le train et ce nouveau statut fait que sa femme a horreur de la liberté d’artiste irresponsable dit-elle de Lucien Rochette et sa ribambelle de flyés. Mon père n’a donc aucune chance…

Mais pourtant si… Ma mère est profondément amoureuse, au point de rencontrer mon père en cachette ( les femmes me diront plus tard qu’elle était considérée comme la plus belle femme de la ville de La Tuque).

La malle de mon père, son trousseau de noces est prêt…. tout a été payé… il n’a rien mais il n’a pas de dettes…. Pour tenter de conquérir la mère de ma mère, il fait la promesse à ma mère d’abandonner la musique ap`res son mariage… Mais rien n’y fait…

Mon grand-père Lucien revient de St-Raymond de Portneuf…. il a échangé son cheval pour des bottes pour aller plus loin dans la vie… Il veut aller au mariage de mon père avec ses belles bottes d’artiste… La guerre pogne entre mon père et mon grand-père Lucien….

Dans le même moment, mon oncle Paulo , aussi laid que Fernandel, décide de conquérir ma tante Yolande en passant devant chez elle en brassant ses cennes noires dans ses poches…. Se disant que si mon père a réussi avec sa trompette à conquérir son épouse,  il est capable de mieux faire que lui et de réussir avec ses cennes noires à conquérir la sienne…

Tout cela sur fond de musique classique… car durant l’été, toutes les fins de semaine, l’harmonie de La Tuque joue au parc pour la population… Ma mère y va…. Mon grand-père Lucien joue de la grosse caisse je crois, mon oncle Paulo lui est rebelle… et comme mon père est iere trompette… quand il la lève dans les airs… c’est toute une population qui lève avec lui.

Le mariage a lieu, pour le meilleur et pour le pire… Sur la photo de noces que mon frère François a je crois, personne n’est heureux…. Sauf le père de ma mère qui avec sa sagesse d’homme des silences-musiques en lui-même semble savoir que tout va finir par s’arranger. La mère de ma mère a prétendu avoir eu une faiblesse cardiaque pour ne pas y assister….

Nous sommes en 1947… le 12 décembre 1948, je nais…

Je nais dans la magie de l’amour…. Mes plus anciens souvenirs tournent autour de la même scène… mon père part travailler… le père de ma mère arrive, avec sa pipe, dans la chaise bercante après avoir sorti les poubelles ou pelletter le perron, puis dans un silence presque parfait… il écoute ma mère parler de son bonheur au quodidien…

C’.est drôle parce qu’aujourd’hui, depuis 7 ans maintenant, depuis qu’Isabelle m’a demandé d’être son grand-père, je me revois dans cet homme de respect et de silence et je me trouve chanceux d’avoir eu un modèle de bienveillance si lumineux dans ma petite enfance….

Ma mère m’a conté que mon père, en se mariant, lui avait fait la promesse de ne plus jamais refaire de musique, ni à l’harmonie ni ailleurs pour se consacrer à sa vie de couple… Mais un jour, que m’a dit ma mère, mon oncle Paulo l’appelle de l’hotel pour dire qu’il manque un musicien.. qu’on a vraiment besoin de lui… Ce soir-là, ma mère le voyant soufrrir en marchant de long en large dans la maison, l’a relevé de sa promesse…

La mère de ma mère, rancunière à l’extrême refusait de revoir ma mère… Mon grand-père Lefebvre voyageait entre les deux maisons avec une sagesse étonnante.. Un jour il arrive avec un pydjamas que la mère de ma mère avait tricoté pour moi… Et mon père de dire: OK c’est le temps d’aller lui montrer son petit-fils habillé dans son pydjamas… Et je me rappelle de ce moment-là… Je ne me rappelle pas avoir vu ma grand-mère maternelle par la suite… Sans doute est-elle morte pas longtemps après….

La suite de cette petite enfance est faite de la poésie de mon oncle Paulo… Je me rappelle de l’orchestre de mon père venant répéter dans le salon entre Noel et le jour de l’an… des jeunes hommes… Mon oncle Paulo à l’accordéon, mon oncle Raymond à la guitare, mon père à la trompette, Flash Léveque à la batterie, Castrof à la contrebasse…..

Puis, comme ma mère me l’a conté… une veille de jour de l’an chez mon grand-père Lucien, les meubles avaient été sorti dehors pour une soirée de danse avec l’orchestre de mon père… une histoire de bataille reliée à la saoulerie… le lendemain, gueule de bois ou pas, tous étaient là pour la bénédiction paternelle de mon grand-père Lucien…. et ma mère qui n’a jamais bu a refusé par la suite de retourner à ces partys de famille des Rochette… elle tenait bien de sa mère là-dessus… (rancunière))).

Et là, mon oncle Paulo qui avait conquis ma tante Yolande par la poésie de ses cennes noires dans ses poches s’est mis à rêver plus grand…. Après avoir conquis son cœur par des cennes noires, il voulait conquérir son respect par des 10 cents…

Il a donc organisé un pianothon…. dehors, devant le couvent de La Tuque… avec un long ruban gommé sur lequel les gens venaient déposer des 10 cents pour l’encourager… Il s’est arrangé pour faire un recond qui serait enregistré dans le guilness.. mais pas trop grand pour qu’il puisse le battre l’année suivante….

Je me rappelle y avoir été et déposé un 10 cent que mes parents m’avaient donné…

Après avoir conquis le cœur de ma tante Yolande par les cennes noires, et son respect par les 10 cents, il voulut pousser sa poésie encore plus loin…. ce fut la conquête de la confiance en sa poésie par le biais de 25 cents…. l’année suivante… par un autre pianothon….

Quand mon père arrivait à 3 heures du matin après sa veillée à l’hôtel à jouer de la fanfare (dans ce temps-là, les gens s’habillaient comme des cartes de mode pour aller danser et entendre un spectacle d’un ou d’une artiste de Montréal)

Comme je dormais en haut… je me levais et collais mon oreille sur le plancher.. et j’entendais mon père parler de ses lèvres qui saignaient, de sa peine de voir ses musiciens boire au lieu de se consacrer à la beauté de la musique…..

Très souvent, le samedi soir, mon père ramenait à la maison un ou une artiste de Montréal pour manger des toasts à 3 heures du matin… Ma mère m’a dit souvent que ces moments firent partie des moments les plus heureux de sa vie.

Des fois, le dimanche après midi, mon père m’amenait à ses répétitions avec l’orchestre parce qu’il avait reçu les partitions de l’artiste de la semaine suivante à accompagner… Je me rappelle d’avoir été attaché à une chaise avec une ceinture pendant qu’il me montrait la beauté du monde par sa trompette levée dans les airs.

Chaque dimanche matin, mon père se faisait les lèvres sur sa trompette pour sa répétition de l’après-midi… Une nuit… je me mis à répéter exactement tous ses motifs du matin… Je me mis à pleurer… je réalisai que je n’aurais pas le choix de devenir un artiste… et cela me fit une peine terrible….

Et je grandis avec la poésie épique de mon oncle Paulo au piano, au caractère sacré de mon père à la trompette, au pur plaisir de vivre de Castrof à la contrebasse et surtout avec l’amour des femmes de Flash Levesque à la batterie….

La musique avait trouvé en moi le courage d’être poésie universelle au cœur d’une facticité déroutante.

à suivre… www.wow-t.com