LA ROMANCE, LA VICTOIRE DU PETIT PEUPLE SUR LES ILLUSIONS DE SON ÉLITE

Quand on réfléchit sur le thème de  la légende de toute nation sans état par l’angle de sa romance qui fait frémir le petit peuple, et cela il me semble d’une tendance universelle, on ne peut qu’être étonné de la dialectique nano-dynamique bêtement utilitariste créant un malaise entre l’élite et son petit peuple ici même à Caraquet.

Prenons par exemple, la romance d’Evangéline.

Bien sûr, Longfellow en créant ce poème pour consolider le cosmopolitiste américain bien enrobé dans son fondement protestantiste (Evangéline termine quand même sa vie à Philadelphie) ne pourra jamais s’imaginer qu’une traduction biaisée de Pamphile Lemay (1870) puisse provoquer le passage de l’errance fantomatique à l’errance axiologique d’une collectivité dispersée en mode de renaissance culturelle élitiste.

Mais pourquoi donc la romance d’Evangeline, malgré le malaise moderniste des héros romantiques 1969 Moncton qui aimeraient bien s’en débarrasser, malgré les détournements constructivistes maladroits de la déportation (Antonine Maillet, Claude Le Bouthiller et les autres), gagne-t-elle dans l’imagination du petit peuple une position archétype indéracinable?

A cause d’Annie Blanchard qui à star académie 2005, réussit l’impossible, faire de la chanson de Michel Conte un hymne post-moderniste à un cri universel, une nouvelle sédimentation herméneutique. Cette Annie blanchard devient elle-même l’incarnation puissante d’Evangeline, tout comme Emma Haché en littérature théâtrale. Le petit peuple, dans la méfiance instinctive de son élite, sait reconnaître l’universel d’une légende, c’est-à-dire, l’émotion de sa romance.

Dans une perspective nano-moderniste (l’épanouissement du post-moderniste) quand je regarde chanter Annie Blanchard sur You Tube, sa performance de 2005 est devenu un hymne de la république de l’imagination des nations sans états que constitue l’Acadie, mais surtout Caraquet, qui profitant de sa position unique du village le plus long du monde (reconnu historiquement par un dictionnaire), s’est même auto-proclamée capitale de l’Acadie, qui n’existe même pas légalement.

Que nous dit Annie Blanchard, l’Evangéline de la post-modernité acadienne? Qu’il est important d’être en amour avec son rêve avec la même puissance qu’Evangéline a rêvé son amour pour Gabriel.

Le village acadien de la nano-modernité sera peut-être un jour une histoire que l’on marche, mais ou on a hâte d’arriver à la maison la plus vieille du Nouveau-Brunswick ou nous attendent Annie Blanchard et Wilfred Lebouthiller, les Evangéline et Gabriel triomphants, qui nous chantent Evangéline avant de venir nous serrer la main et nous souhaiter bonne chance dans notre vie personnelle oeuvre d’art, le village acadien étant devenu le pays oeuvre d’art des rêveurs et rêveuses de demain.

La fava sera de la nano-modernité sera peut-être une histoire ou, comme pour  le douanier Rousseau en 1890 ou le compositeur minimaliste Eric Satie, on osera célébrer l’artiste naif Patrice Léger et son village de Noel, tout en démontrant par un récit nano-moderniste de l’histoire de l’art que la beauté, étant passée de l’oeuvre à la signature et de la signature à la poïétique reconnaît l’Evangéline des artisans de l’art naif, comme un des moteurs de la capitale de la république de l’imagination que constitue pour sa diaspora, Caraquet.

Durant le festival acadien, tous les jours à midi, on pourrait entendre les cloches des églises, suivi de la chanson d’Evangéline par Annie Blanchard.

On pourrait avoir dans un kiosque au centre des livres des auteurs acadiens, des traductions de la chanson dans toutes les langues, avec comme chanteur ou chanteuse des ambassadeurs et ambassadrices de tous les pays. Car ce qui rend international, c’est l’émotion unique et virale  d’une collectivité nano-numérique (la tour effel pour Paris ou la statue de la liberté pour New York)

Evangéline reste le coeur brûlant d’une nation sans état des plus exceptionnelles, qui possède par son histoire poétique majoritaire ce que l’écrivain et essayiste Edouard Glissant a tenté toute sa vie de modéliser pour sa propre nation, soit une rhysomatisation émouvante dans le tout monde de demain et sa créoalisation nano-moderniste du 21eme siècle dont la globalité de la mondialisation a tant soif.

L’Acadie est au Québec ce que le peintre Poussin est au peintre Caravage, une nation fière de son intemporalité créatrice versus une nation qui se meurt d’inimagination à force d’utilitarisme en quête d’état parmi les états..

La légende d’Evangéline est pour l’Acadie toute entière le pôle magnétique le plus puissant de l’histoire française du Nouveau-Brunswick. Sa force dépasse même le texte du refus global de Borduas au Québec, parce qu’il appartient pour toujours au petit peuple, servant de boussole imaginative aux créateurs et créatrices élitistes de demain, et cela dans tous les arts confondus.

Pierrot vagabond