Ma Presse
JENNIFER GONZALEZ COVARRUBIAS
Agence France-Presse
Tapachula
Après avoir passé une deuxième nuit au Mexique, des milliers de Honduriens s’apprêtaient à reprendre lundi leur difficile marche vers les États-Unis, défiant le président américain Donald Trump et les autorités mexicaines.
« Nous allons de l’avant », a déclaré à l’AFP Juan Carlos Flores, un migrant hondurien de 47 ans. Le Mexique « ne nous a pas reçus comme nous l’espérions, ils peuvent nous renvoyer au Honduras, nous savons aussi qu’il y a ici des narcotrafiquants qui enlèvent et tuent les migrants, mais nous avons encore plus peur dans notre pays », a-t-il dit.
Les autorités mexicaines étaient parvenues à bloquer jeudi cette « caravane » mais de nombreux migrants sont entrés illégalement dans le pays par le fleuve Suchiate séparant le Mexique du Guatemala. Ils ont repris leur avancée en masse, tandis que Donald Trump a assuré dimanche que tout était mis en oeuvre « pour arrêter l’assaut ».
Environ 3000 personnes composent cette « caravane », selon un commandant de la police fédérale, mais le chiffre pourrait être plus élevé encore.
La «caravane» de migrants honduriens défie Trump et Mexico
Les migrants sont arrivés dimanche en fin de journée à Tapachula, dans le Chiapas, après avoir marché sept heures et parcouru 38 km sans interruption. Epuisés, ils se sont installés dans un parc, où ils ont fait la queue pour recevoir une tortilla de maïs et une cuillerée de haricots noirs.
« Notre courage est plus grand que les menaces » de Donald Trump, a affirmé Britany, une jeune migrante venant de recevoir sa portion de nourriture.
Risque d’expulsion
Durant la journée, les migrants avaient affronté la chaleur tropicale, escortés par des policiers locaux et survolés par un hélicoptère.
La plupart d’entre eux n’avaient avec eux ni eau, ni nourriture. Ils ont applaudi les habitants qui leurs ont donné des vivres et scandé « Mexico ! Mexico ! » pour les remercier.
Au cours du trajet, une centaine de membres des forces de l’ordre les ont « invités » à monter dans des camions pour rejoindre des refuges et entamer des procédures de visa ou de demandes d’asile. Mais la plupart des migrants ont refusé, craignant un piège.
Le président américain avait menacé jeudi de fermer la frontière avec le Mexique si les autorités ne bloquaient pas l’avancée de la « caravane ». Dimanche, il a déclaré sur Twitter que les Honduriens devaient « d’abord faire une demande d’asile au Mexique ». « S’ils ne le font pas, les États-Unis les rejetteront », a-t-il prévenu.
La caravane devait partir lundi en direction de la ville de Huixtla, dans ce même État du Chiapas, avant de tenter de rejoindre Tijuana ou Mexicali, dans le nord du Mexique.
Le trajet pourrait prendre un mois, selon Rodrigo Abeja, membre de l’organisation Pueblos Sin Frontera (Peuples sans frontière), qui a déjà accompagné plusieurs caravanes.
Parmi ces migrants se trouvent de nombreuses femmes et enfants. Tous s’exposent au risque d’être arrêtés et expulsés vers leur pays d’origine.
« Ce gouvernement dit d’un côté qu’il respecte les droits des migrants, mais il ne leur permet pas un passage digne et sûr en refusant de leur fournir rapidement un visa humanitaire » déplore M. Abeja.
Seconde caravane
Cette marche vers les États-Unis a débuté il y a une semaine à San Pedro Sula, dans le nord du Honduras, après un appel sur les réseaux sociaux relayé par un ex-député hondurien.
Une seconde caravane d’environ un millier de Honduriens a entamé dimanche la traversée à pied du Guatemala en direction de la frontière mexicaine.
Selon le ministère de l’Intérieur mexicain, entre vendredi et dimanche, 1028 demandes d’asile ont été déposées.
Sur le pont frontalier, un millier de migrants se trouvaient dimanche toujours dans l’attente d’entrer légalement au Mexique, selon un décompte de l’AFP.
La frontière avait été partiellement ouverte durant la journée pour laisser entrer plusieurs dizaines de migrants, en majorité des femmes et des enfants qui ont été conduits dans des refuges.
La route à travers le Mexique expose les migrants au risque d’agressions de la part de groupes criminels.
En 2010, 72 d’entre eux avaient été séquestrés par le sanguinaire cartel des Zetas avant d’être assassinés dans l’État de Tamaulipas (nord) pour avoir refusé de rejoindre leurs rangs.
Plus de 500 000 personnes traversent chaque année illégalement la frontière sud du Mexique pour tenter ensuite de remonter vers les États-Unis, selon des chiffres de l’ONU.