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L’Univers serait né dans la « fluidité »
Illustration artistique du big bang formateur de notre Univers.Représentation artistique du big bang à l’origine de notre Univers. Photo : NASA
Les propriétés de la matière qui composait l’Univers moins d’une seconde après le big bang ont été décrites par des physiciens du CERN (Organisation européenne pour la recherche nucléaire), associés à l’expérience ALICE.
Un texte d’Alain Labelle
Ce plasma de quarks et de gluons dans lequel baignait l’Univers, est, comme son nom l’indique, un état particulier composé de particules fondamentales, les quarks, et de particules qui les lient ensemble, les gluons.
Le saviez-vous?
Le big bang, l’explosion originelle qui a mené à notre Univers, est survenu il y a 13,8 milliards d’années.
Selon le physicien You Zhou et ses collègues, cette matière primordiale qui précédait la formation des atomes se comportait à l’image d’un liquide que l’on peut décrire en termes d’hydrodynamique.
Le détecteur ALICE. Le détecteur ALICE étudie le plasma de quarks et de gluons, un état de la matière qui a existé juste après le big bang. Photo : CERN
L’équipe de physiciens a réussi à obtenir cette matière en remplaçant le plomb (habituellement utilisé dans ce type d’expériences) par du xénon, un atome « plus petit » qui possède moins de nucléons dans son noyau.
«En créant des collisions d’ions, nous avons créé une boule de feu qui recrée les conditions initiales de l’Univers à des températures supérieures à plusieurs milliers de milliards de degrés.»
—You Zhou, Institut Niels Bohr
Contrairement aux conditions observées dans l’Univers cependant, la durée de vie des gouttelettes de plasma quark-gluon produites en laboratoire est très courte, c’est-à-dire une fraction de seconde.
Dans ces conditions, la densité des quarks et des gluons est très élevée, si bien qu’un état particulier de la matière se crée, dans lequel les quarks et les gluons sont pratiquement libres, composant un véritable plasma originel.
ALICE 101
•ALICE est l’abréviation de l’anglais A Large Ion Collider Experiment.
•C’est un détecteur d’ions lourds installé sur l’anneau du Grand collisionneur de hadrons (LHC) du CERN.
•Il étudie le plasma de quarks et de gluons, un état de la matière qui aurait existé juste après le big bang.
•Ce détecteur mesure 16 mètres de haut sur 26 mètres de long, et sa masse est de 10 000 tonnes.
« L’un des défis auxquels nous étions confrontés est que, dans les collisions d’ions lourds, seules les informations sur l’état final des nombreuses particules détectées par les expériences sont directement observables », explique You Zhou.
Or, les scientifiques voulaient décrire les conditions en présence au début de la collision et quelques instants après.
Ils ont donc mis au point des outils puissants pour étudier les propriétés d’une gouttelette de plasma quark-gluon (présent dans l’Univers primitif).
Ces outils permettent l’étude de la distribution spatiale des milliers de particules qui émergent des collisions lorsque les quarks et les gluons sont piégés dans les particules qui composent l’Univers aujourd’hui.
Le degré de distribution des particules (le fait qu’il y ait plus de particules dans certaines directions) reflète pour sa part trois éléments d’information principaux :
•la géométrie initiale de la collision;
•les conditions qui prévalaient à l’intérieur des nucléons lors de la collision;
•la viscosité du plasma.
Mieux cerner les propriétés de transport du plasma quark-gluon aide à déterminer la forme finale du nuage de particules produites après la collision.
Or, la compréhension des propriétés initiales de la « soupe primordiale » qui a mené à la naissance de l’Univers est considérablement améliorée par ces nouvelles expériences.
Les physiciens prévoient peaufiner leurs travaux, mais cela nécessitera le développement de nouveaux instruments au LHC, le plus grand et le plus puissant accélérateur de particules au monde.
Le détail de ces travaux est publié dans le journal Physics Letters B (en anglais).