(Sainte-Agathe-des-Monts) En apercevant son cousin Denis, de La Tuque, venir assister à l’avant-première de son portrait documentaire au Théâtre Le Patriote de Sainte-Agathe-des-Monts, Pierre Rochette devient fou comme un balai.
D’ailleurs, à première vue, pour ne pas dire au premier visionnement, la folie semble bien décrire sa démarche que deux finissantes en journalisme, Véronique Leduc et Geneviève Vézina-Montplaisir, ont bien voulu immortaliser sur pellicule.
Car à 57 ans, après une vie artistique et intellectuelle mouvementée, le p’tit gars de La Tuque décide de vivre son rêve de jeunesse et de parcourir le Québec, dont la Mauricie, comme un vagabond, ce qu’il fait depuis plus de trois ans.
Il renie son style de vie, donne sa maison et ses économies, ferme ses comptes en banque et part, sans le sou, découvrir la province à la recherche de rêveurs comme lui. Avec comme seules possessions, sa vieille guitare, un bâton de marche et un cahier pour écrire.
C’est en août 2007 que Véronique Leduc fait sa rencontre par hasard alors qu’il venait de passer la nuit sur le terrain de La Chasse-Galerie, une coopérative culturelle dans la région de Lanaudière.
Il faut dire que Pierre Rochette dort souvent dans des endroits peu communs, tantôt sur un congélateur, tantôt sous un pont. Et il a même déjà trouvé refuge dans une cabine téléphonique, aux Piles…
«Il avait attendu le matin dans le but de rencontrer le rêveur qui avait imaginé cette petite salle de spectacle», raconte-t-elle. Le personnage la fascine suffisamment pour suivre ses traces, avec la coréalisatrice Geneviève Vézina-Montplaisir.
Entre le portrait, le documentaire et le film artistique, Mon ami Pierrot, Le dernier homme libre, montre le cheminement particulier de celui qui, de La Tuque à Shawinigan, en passant par le Lac-à-Beauce, sème le rêve chez tous ceux et celles qu’il rencontre.
S’il apparaît au départ comme un homme rêveur et désorganisé, le fils de Roger Rochette, ancien réalisateur à CKTM, porte pourtant un lourd bagage d’accomplissements.
Outre sa thèse sur le rire et son doctorat en intelligence collective, il aura été membre d’un groupe de musique, Les Contretemps, qui aura voyagé à travers le monde en plus de fonder le fameux bar du Vieux-Montréal, Les Deux Pierrots.
D’ailleurs, l’une des scènes les plus pathétiques du documentaire, c’est de voir Pierre Rochette, le vagabond, revenir dans sa boîte à chansons après plusieurs années pour y interpréter une pièce, devant un public bruyant et indifférent.
Découlant de deux années de tournage, le portrait documentaire de 50 minutes, à la fois surprenant et touchant, montre l’homme dans ses pensées et, aussi, ses nombreuses compositions écrites spontanément, au fil des rencontres.
Et maintenant, il emprunte la route du web avec un vieil ami chansonnier Michel Woodard, sous le concept de rêveurs équitables (www.reveursequitables.com). Quant au film, il sera présenté le 13 décembre au Bistro Qui fait Quoi, à Montréal, et le 19 décembre à Québec.
«En 2007, après sept années passées dans les livres pour trouver ma place dans la littérature mondiale, j’ai décidé de prendre le rôle le plus petit de la société, soit celui de l’archétype du quêteux traditionnel de Claude-Henri Grignon.
Je suis fondamentalement un philosophe politique qui rêve d’être le Montesquieu du XXIe siècle et qui se déguise en vagabond poète avec une guitare pour écouter ce que les citoyens du Québec ont à dire de leur pays», conclut l’auteur d’un premier tome de 3000 pages, d’une trilogie à venir, qui, dit-il, sera peut-être considéré comme un génie… après sa mort.