Un peu plus près des premières étoiles de l’Univers
Illustration artistique du big bang formateur de notre galaxie.Illustration artistique du big bang formateur de notre galaxie. Photo : NASA
Des preuves de la formation d’étoiles seulement 250 millions d’années après le big bang ont été recueillies grâce à des observatoires installés au Chili.
Un texte d’Alain Labelle
C’est à l’aide du grand réseau d’antennes millimétrique/submillimétrique de l’Atacama (ALMA), une collaboration internationale composée principalement des observatoires ESO (Europe), NRAO (E.U.) et NAOJ (Japon), que des astronomes ont pu observer la formation d’étoiles au sein de la très lointaine galaxie MACS1149-JD1 à une époque bien plus reculée que ce que l’on imaginait à ce jour, c’est-à-dire 250 millions d’années seulement après l’événement créateur de l’Univers.
Illustration de l’amas de galaxies MACS J1149.5+2223. Dans lequel apparaît la galaxie MACS1149-JD1. Sur cette image acquise par Hubble figure l’amas de galaxies MACS J1149.5+2223. En médaillon figure la lointaine galaxie MACS1149-JD1, observée telle qu’elle était voici 13,3 milliards d’années par ALMA. La distribution en oxygène détectée au moyen d’ALMA arbore ici une couleur rouge. Photo : NASA/ESA/Hubble
Dans un premier temps, l’équipe internationale d’astronomes a détecté une très faible lueur émise par de l’oxygène venant de cette galaxie lointaine.
Lorsque cette lumière infrarouge a traversé l’espace séparant la galaxie source de la Terre, sa longueur d’onde initiale s’est étendue d’un facteur 10 sous l’effet de l’expansion de l’Univers.
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L’équipe en a déduit que le signal avait été émis quelque 13,3 milliards d’années auparavant, soit 500 millions d’années après le big bang, par l’oxygène le plus distant détecté à ce jour par un télescope.
En outre, la présence d’oxygène atteste de l’existence de générations stellaires antérieures dans cette galaxie.
«J’ai été ravi d’observer la raie de l’oxygène lointain au sein des données d’ALMA.»
—Takuya Hashimoto, Université Sangyo d’Osaka
Outre la lueur émise par l’oxygène capturée par ALMA, une faible raie en émission de l’hydrogène a également été détectée par le Très Grand télescope (VLT) de l’ESO.
L’une et l’autre de ces observations ont conduit à déterminer la distance séparant la Terre de la galaxie en question. MACS1149-JD1 constitue ainsi la galaxie la plus lointaine dont la distance est connue avec précision, et la plus lointaine observée à ce jour au moyen d’ALMA ou du VLT.
« Cette galaxie nous apparaît telle qu’elle était lorsque l’Univers était âgé de 500 millions d’années seulement. À cette époque reculée, elle abritait déjà une population d’étoiles d’âge avancé », explique Nicolas Laporte, de l’University College de Londres au Royaume-Uni.
«Nous sommes donc en mesure d’utiliser cette galaxie pour sonder une période totalement inexplorée et encore plus jeune de l’histoire cosmique.»
—Nicolas Laporte
Et le big bang fut
À la suite de l’explosion originelle, intervenue il y a 13,8 milliards d’années, l’Univers demeurait totalement dépourvu d’oxygène.
Infographie représentant l’espace-temps. On y voit l’expansion de l’univers. Le big bang a eu lieu il y a 13,8 milliards d’années. Photo : NASA
Il était composé alors d’un gaz uniforme constitué d’éléments légers comme l’hydrogène et l’hélium créés par cette gigantesque explosion.
La création de l’oxygène, mais aussi d’éléments plus lourds comme le fer et le carbone, résulte de la survenue de processus de fusion au sein des premières étoiles avant qu’il ne soit dispersé par des explosions d’étoiles massives.
La détection d’oxygène au sein de MACS1149-JD1 laisse donc à penser que les générations stellaires antérieures s’étaient déjà formées et avaient déjà libéré l’oxygène 500 millions d’années après la naissance de l’Univers.
La première génération d’étoiles
Pour réussir à dater l’apparition de la première génération d’étoile, l’équipe a entrepris de reconstituer l’histoire antérieure de MACS1149-JD1 au moyen de données acquises par les télescopes Hubble et Spitzer.
Ces données ont ensuite été insérées dans un modèle fixant le début de la formation des étoiles à quelque 250 millions d’années après le big bang. La luminosité observée de la galaxie s’en est ainsi trouvée expliquée.
L’émergence des galaxies
L’âge avancé des étoiles observées au sein de MACS1149-JD1 interpelle les chercheurs, qui se demandent à quel moment les galaxies ont émergé de l’obscurité totale – un phénomène connu sous le nom d’aube cosmique.
L’établissement de l’âge de MACS1149-JD1 a permis aux scientifiques de démontrer que les galaxies existaient antérieurement à celles que nous détectons actuellement au moyen de la méthode directe.
«La datation de l’aube cosmique constitue le Graal de la cosmologie et de la formation galactique.»
—Richard Ellis
« Grâce à ces nouvelles observations de MACS1149-JD1, nous nous approchons de l’époque à laquelle remonte la toute première lumière stellaire! Et parce que nous sommes tous constitués de poussière d’étoiles, cela équivaut à découvrir nos propres origines », se réjouit Richard Ellis.
Le détail de ces travaux est publié dans la revue Nature.