DU MALHEUREUX NON-OUBLIÉ LOUIS MAILLOUX AU REMARQUABLE OUBLIÉ MICHEL-VIDAL BLANCHARD

Mon très cher Clarence Lebreton,

Tu connais mon immense joie à croiser ta personnalité vraiment unique, en qui je vois ce que personne n’a encore vu à Caraquet: un génie élitiste lucide, aux intuitions corrosives, mais polies comme le sont souvent ceux et celles qui honorent par leur retenue intellectuelle la richesse communicationnelle d’une communauté exigue.

Ceci dit, j’ai lu tes deux livres, celui sur les conflits entre l’abbé Allard et les eudistes et celui sur l’affaire Mailloux.

Ce qui me frappe, c’est l’exercice talentueux de ta neutralité d’historien versus des enjeux qui auraient intérêt à s’actualiser à titre d’historien-activiste.

Je te verrais très bien écrire un livre dont le titre serait: LA MALHEUREUX NON-OUBLIÉ LOUIS MAILLOUX ET LE REMARQUABLE OUBLIÉ MICHEL-VIDAL BLANCHARD.

L’ajour d’un côté voltairien à ta personnalité si fluide ne pourrait que contribuer magistralement à corriger une injustice que fait subir le village de Caraquet à son plus illustre héros de néo-nationalisme acadien de la deuxième renaissance,
MICHEL-VIDAL-BLANCHARD.

Quand je passe devant le monument de Louis Mailloux à Caraquet, ça me fait penser aux héros québécois de l’élite religieuse (les Jésuites martyrisés, Dollard, Madeleine de Verchères), Dans une perspective nano-moderniste, Mailloux représente plutôt un individu qui a reçu une balle mortelle parce qu’il était à la mauvaise place au mauvais moment.

Mais quand je passe devant la maison de Michel-Vidal-Blanchard, je me dis ceci: voici un héros remarquable qui fut consciemment à la bonne place au bon moment de l’histoire, rédacteur en chef du journal étudiant de l’université de Moncton, membre d’une famille d’activistes illustres (sa mère, syndicaliste exceptionnelle, sa soeur Louise présidente du parti acadien, son frère un érudit activiste…. et j’en passe.

Mon très cher Clarence, qui mieux que toi peut réécrire l’histoire des deux héros de Caraquet, en s’appuyant sur les écrits juridiques de Michel Bastaraste sur le bilinguisme et son évolution prospectiviste pour bien contextualiser les acquis de l’histoire et non cimenter les ressentiments historiques.

Evangeline est et restera la meilleure porte-parole de L’Acadie diaspora. Mailloux et Blanchard sont, par contre,  les héros générationnels dont on doit reconnaître la contribution, celle de Blanchard étant remarquablement censurée par l’élite actuelle.

Que Michel-Vidal Blanchard ne trouve pas sa place dans le livre 2014 sur L’Acadie nord-américaine se doit d’être corrigé dans la prochaine édition.  Et pourquoi pas par un article de Clarence Lebreton? Je pense qu’il serait équitable que la photographie de Michel-Vidal Blanchard se retrouve sur la page couverture avec les autres.

Comment reconnait-on un véritable héros? Par sa redécouverte générationnelle. De la même manière que Baudelaire fut traité de pornographe (les fleurs du mal) avant d’être célébré par la génération suivante, je te prédis, mon très cher Clarence que dans vingt ans, on déboulonnera symboliquement la légende de Mailloux pour la remplacer par celle de votre grand héros du néolibéralisme acadien que fut Michel-Vidal Blanchard.

Il serait important que toute la population de Caraquet lui dise merci, pendant qu’il est encore vivant.

Pierrot vagabond