C’est peut-être là la poésie à laquelle je suis le plus sensible…. J’ai marché le K-anada pour serrer la main à de grandes rêveuses ou à de grands rêveurs…. j’aimais voir dans leurs yeux LA BEAUTÉ DU MONDE en action…. Je changeais de village pour ne pas être blessé par l’ontike du quotidien de ceux et celles dont les errances sont … soit fantomatiques, soit axiologiques.
Chaque fois qu’on m’embarquait dans une auto… ou que l’on m’emmenait dormir dans une maison… je me sentais profondément bouleversé par la souffrance insondable de celles et ceux qui m’accueillaient.
Je me disais… mais c’est pas possible… Comment peut-on laisser les dépendances de quelque nature que ce soit ronger la poésie? …. L’horreur des dépendances quelques soient…
Je me souviens d’une nuit à Val-Morin…. un homme d’une quarantaine d’années m’avait ramassé sur la 117 et m’avait emmené dormir chez lui. Pendant que je dormais… toute la nuit… il avait consommé du crack et hurlait au téléphone à son vendeur de crack de lui fournir ses doses même s’il n’avait pas d’argent pour le payer… Le lendemain matin… je partis en douce… sans déjeuner… l’homme s’étant assoupi entre deux crises….
Et de cet autre… sortant d’une réunion des alcooliques anonymes me ramassant sur la route et m’emmenant dans son loyer…. incroyablement en désordre avec des ordures jamais ramassées… Quelle détresse… mais quelle détresse….
Et l’autre tellement saoul dans son char que j’ai du tenir la roue… l’obliger à se ranger… il pleurait comme un enfant parce qu’il se trouvait laid et qu’aucune femme ne voulait de lui…
Et l’autre en crise de peine d’amour qui faisait le tour du parlement avec son auto et ne voulait pas me relâcher tant qu’il n’aurait pas moins de peine… Cela a du durer un bon deux heures…
Et l’autre qui avait le cancer et m’a raconté tous ses crimes… avec une carabine dans son camion… ne sachant trop s’il allait se tirer… ou aller mourir chez sa fille…
Quand je me retrouvais seul avec ma poésie, sans un sous, la faim au ventre, je retrouvais ma paix intérieure en contemplant les arbres, en marchant le long des lignes blanches d’une route sans fin… la nuit venue… la lune, les arbres, les coups de bâton de liberté sur l’alsphate…
Et je reposais, nuit après suit ma question: SI JE PREND SOIN DE L’UNIVERS… EST-CE QUE L’UNIVERS VA PRENDRE SOIN DE MOI?
Puis… mon corps tombait au petit jour… dans un boisé…. et la poésie sous forme de brosses d’être et d’attaques d’être venait me visiter.
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Mais quand je rencontrais un rêveur ou une rêveuse qui prenait soin du rëve d’une autre personne… ah…. quelle joie…. quelle joie….Je me rappelle de cet homme qui, à 5 heures du matin, en Gaspésie, au début avril… me vit sur la route et me héla… j’entrai avec lui dans son atelier… Il me dit… Je prends soin de ma femme… elle est très malade… Si elle ne va pas mieux… on pas ouvrir notre restaurant cet été…. ca m’inquiète… Et il me donna un pot avec du poisson dedans….
Et cet autre… cultivateur âgé… qui m’arrêta… pour que de sa galerie… il puisse me montrer sa femme au loin dans les champs… en me disant…. On se fait vieux… je sais pas combien d’années ma femme et moi on va être capables de tenir le coup… Comme ses yeux prenaient soin d’elle… c’était magnifique… Elle était son rêve…. il se consacrait à prendre soin de son rêve….
Et ce couple….qui avait ouvert une galerie ou elle peignait et lui sculptait…. Comme ils prenaient soin du rêve de l’un et de l’autre…
Oui… les grandes rêveuses et les grands rêveurs sont non seulement des artistes du quotidien, mais honorent l’humanité oeuvre d’art par des yeux de bienveillance et de dévotion pour le rêve de l’autre.
C’est cela que j’ai voulu théorisé par les quatres questions du pays oeuvre d’art:
1: Quel est ton rêve?
2: Dans combien de jours?
3: Qu’as-tu fais aujourd’hui pour ton rêve?
4: Comment ton rêve prend-il soin de la beauté du monde?
Pierrot vagabond
Pierrot Vagabond